Mains de fer
Forgent tapent et battent
D’un geste régulier, la vie
Prend forme le fer cède
Charrues herses faucilles
Cheval chaussé tonneau cerclé
Fer dompté maté
Mains de terre
Calleuses crasseuses grises
Couvertes de la chair-mère
Sèment sarclent moissonnent
Désherbent (dos courbé)
Fabriquent à nouveau
La vie pérenne de la terre
Matière première : trésor
Mains d'art, mains d'or
fabriquent d'une minutie précieuse
Les instruments de la planète
Ceux des utilités
Ceux des loisirs
Ceux des moments de liberté
Magie d'un son, des yeux, des sens
Mains de soin
Palpent tâtent guérissent
Trouvent remède aux maux
Sectionnent d’un coup sec
Du bistouri incisent précisent
Remodèlent reconstruisent
La charpente des hommes
Mains de bois
Coupent abattent tranchent
Dans le vif de la forêt
Poncent cisellent découpent
Les objets utiles ou prêts
Art premier des êtres premiers
Tête de bois mains boisées
Nervures manuelles insérées
Mains de fil
Cousent tissent brodent
Tricotent rapiècent
Les étoffes les décors
Dans lesquels évoluent
Des hommes élégants
Des hommes habillés
Qui n’ont plus froid
Et sont parés comme
Des rois
Gustave Courbet
Mains de pierre
Briseuses de cailloux
Abattant des montagnes
Fabriquant les étincelles
Sculptant les bols les écuelles
Mains rugueuses éclatant
Rangeant les pierres
Complices éternellement
Emile Zola
Mains d’encre
Couchant les mots et les maux
Sur les cahiers d’histoire
Narrant les actions les évènements
Les tristesses les joies les peines
D’hommes imparfaits parfois héros
En rimant ,récitant jouant la prose
Au fils des siècles, inlassablement
Sage-femme aztèque administrant des herbes
Mains de vie
La saisissent d’un coup
Tranchent dans le vif
Le mince cordon qui relie
Un être à un autre
S’en est fini, vole à présent
De tes propres ailes, la vie
T’appartiens
Picasso peint
Mains de gouache
De toutes les couleurs
De toutes les éclaboussures
Arrangent la peinture
Comme elles le désirent
Pourvu qu’en face les hommes
Sachent lire la merveille
Offerte aux yeux ébahis
Mains de pâte
Pétrissent, tournent cuisent
Montent en neige en mayonnaise
Les aliments comme les tourments
Goûtent inventent toujours
Les substances, les marient
Les unissent, c’est la chimie
De la pâte à cuire de la vie
Mains de velours
Qui caressent enjôlent
Dispensent l’amour toujours
Câlinent réconfortent
Rassurent ouvrent les bras
Puis parfois
Ferment les yeux
Alfredo Rodriguez
Mains fluides
Réparent les souffrances
Les envoient en errance
Aspirent les maux
Au sein des ruisseaux
Creusés par les ans
Dans les mains d’argent
Mains potelées
Rondes moelleuses
Molletonnées, aux fossettes
Creusées de gaieté
Petites mains dodues
De l’enfance disparue
Paul Berthon
Mains muses
Grattent cordes et bouchent-trous
Pour fabriquer les sons, ravissant
Les oreilles éternelles éprises
De musique diamant
Mains douces
Mains de mamans-fées
Caressantes et dorées
Abondantes reposantes
Les seules et uniques
Mains rêvées des hommes
Depuis l’éternité
Par chemains
Sillons profonds nervures feuillues
Cal endurci comme les ans péris
Ecriture ouvrière pour matière prospère
Parchemin sacré de la vraie humanité
Les 5 doigts de ma main Elfi
Mains travailleuses
Toujours en action, fabriquent
Sans cesse souffrent souvent
Se tordent se déforment
Se nouent des blessures
Du temps et du boulot
Mains qui connaissent la vie
Qui l’ont si souvent servie
Mains qui n’en peuvent plus
N’arrivent plus à se détendre
Caresser les têtes tendres
Soulager les crevasses
Les ridules les marques
Indélébiles, souillures du temps
Mains qui n’attendent alors
Que de ranger leurs doigts
Délicatement dans un fourreau
De velours rouge sang
Carole Radureau ( 05/01/2013)