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  • : Le blog de Comite pour une Nouvelle Resistance- CNR
  • : L’association, s’inspirant des idéaux et des réalisations énoncés et établis par le Conseil National de la Résistance (C.N.R.) a pour but la mise en œuvre de réflexions, d’initiatives et d’actions visant à faire naître et vivre une « Nouvelle Résistance » favorisant la défense des conquêtes des mouvements sociaux de notre République.
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Lucie Aubrac résistante

St André des Alpes / 9 /07/11

Comité pour une Nouvelle Resistance- CNR / St André des Alpes / 9 / 07/ 11

 

Explication du maire , des raisons pour lesquelles  lui  et son équipe aient refusé le matin meme l'accès  à la salle alors que cette journée était prévue , organisée de longue date ...

Tout se termina bien  , Monsieur le maire et son équipe  ont fini par " capituler "  face à l'indignation de nos résistants d'hier...

17 avril 2013 3 17 /04 /avril /2013 10:23

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L’association  « Comité pour une Nouvelle Résistance-CNR »

Organise pour la quatrième année consécutive le déplacement au plateau des Glières au départ  de NICE.

Des arrêts sont prévus pour récupérer les camarades des autres départements. 

 

Pour plus de renseignements cliquez ici : 


Rassemblement Au Plateau Des Glières . 18 /19 Mai 2013

 

 

 

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9 avril 2013 2 09 /04 /avril /2013 11:22

04 avril 2013 Par Laurent Mauduit



capi.pngDans les turbulences gravissimes du scandale Cahuzac, dans la dépression suscitée par la politique d’austérité, les Français peuvent légitimement penser qu’on leur a volé leur victoire arrachée à la présidentielle et que tout continue comme avant : l’affairisme en même temps qu’une politique à l’avantage du capital. Voilà le constat principal qui est au centre du livre que je viens d’écrire L’Étrange Capitulation (Editions Gawsewitch, 20,90€, 303 pages) et qui est publié ce vendredi.

 

Ce livre, qui tient la chronique stupéfiante des premiers mois du quinquennat de François Hollande, je l’ai d’abord conçu comme une invitation au débat. La crise démocratique ouverte par le scandale Cahuzac et la crise sociale accentuée par la politique d’austérité, invite à mon sens, à un sursaut et à tout le moins à une confrontation entre tous les courants de la gauche.

Un grand débat démocratique : voilà donc quelle est mon ambition au travers de cet ouvrage, dont on lira ci-dessous, en guise de première contribution, l’introduction :

              -------------------------------

Dans les moments d’indignation ou d’accablement, il est des livres dans lesquels il est bon et utile de se replonger. Pour retrouver de la hauteur quand les temps sont médiocres. Pour retrouver de l’espoir quand l’heure n’en permet guère.


imagesuuuu.jpgAu lendemain de l’élection présidentielle de 2012, j’ai donc éprouvé le besoin de relire L’Étrange Défaite, l’essai rédigé par le grand historien Marc Bloch (1886-1944) pendant l’été 1940 et publié pour la première fois aux éditions Franc-Tireur, en 1946, deux ans après son assassinat par la Gestapo - ce formidable essai que l’auteur a écrit pour raconter la débâcle française du mois de juin 1940, conséquence des stupidités et de l’arrogance de l’état-major, mais tout autant de la crise morale des élites françaises de l’époque. Je me suis immergé de nouveau dans cette lecture, pensant que j’y trouverai peut-être des clefs pour décrypter notre histoire présente.


Au premier examen, on se dira, certes, que ce rapprochement n’a pas grand sens. Pourquoi en appeler à Marc Bloch pour décrypter les débuts du quinquennat de François Hollande ? À l’évidence, les deux époques n’ont guère de points communs. À quoi bon, exhumer cette Étrange Défaite ? L’historien fut un républicain exemplaire, qui payât de sa vie ses convictions démocratiques  et cette histoire-là est sans doute trop singulière pour que l’on cherche à y puiser des enseignements pour les temps présents.


Cette Étrange Défaite, c’est l’histoire, magnifiquement racontée, d’une France qui, en juin 1940, sombre presque d’elle-même, sous les avancées de l’armée allemande. Par la faute d’une hiérarchie militaire sclérosée ; de services de renseignements totalement incompétents ; d’un haut commandement suffisant et sourd aux malheurs de la troupe, qu’il envoie perpétuellement sur les mauvais fronts. Et puis, surtout, c’est l’histoire d’un pays, qui traverse une crise morale majeure ; un pays dont les élites se sont discréditées dans les scandales ; dont les gouvernements récents ont sans cesse capitulé devant les techniciens ; dont la presse, elle aussi, n’assume plus sa mission démocratique et, gangrenée par l’affairisme, ratiocine sans cesse les mêmes fausses évidences. C’est, en somme, l’histoire inédite d’un pays en crise qui s’effondre presque de lui-même. Dont les élites n’ont pas assumé leurs responsabilités. Dont les partis démocratiques ont largement fait faillite.


Et même les partis de gauche, ceux du Front populaire, n’échappent pas à la critique acerbe et lucide de l’historien. Nul parti pris ! Marc Bloch connaît mieux que d’autres l’histoire du mouvement ouvrier et a pour elle de la sympathie. Mais en ces temps de tourmente, la gauche aussi a été défaillante et l’historien le constate avec férocité et consternation : « Je n’ai nulle envie d’entreprendre ici l’apologie des gouvernements de Front populaire. Une pelletée de terre, pieusement jetée sur leurs tombes : de la part de ceux qui, un moment, purent mettre en eux leur foi ; ces morts ne méritent rien de plus. Ils tombèrent sans gloire. Le pis est que leurs adversaires y furent pour peu de choses ». Et ces mots-là, il faut les soupeser. Car c’est le cœur de l’implacable démonstration de l’historien. Oui, tout est là ! « Le pis est que leurs adversaires y furent pour peu de choses ».


Et plus loin, dans sa chronique de la débâcle française, il a ces formules tout aussi cruelles : « Mal instruit des ressources infinies d’un peuple resté beaucoup plus sain que des leçons empoisonnées ne les avaient inclinés à le croire, incapables, par dédain comme par routine, d’en appeler à temps à ses réserves profondes, nos chefs ne se sont pas seulement laissé battre, ils ont estimé très naturel d’être battus ».

C’est cela l’Étrange Défaite : c’est l’histoire d’un pays qui est vaincu d’abord par sa propre faute. Parce que le commandement militaire s’est coupé de la troupe, mais tout autant parce que les gouvernements successifs se sont coupé du peuple. Parce que la démocratie a été trop fortement pervertie par des dérives incessantes sans que nul ne se soucie de la refonder, de lui redonner vie.


Alors pourquoi faudrait-il convoquer cette histoire aussi particulière pour s’appliquer à en décrypter une autre qui, en apparence, ne présente aucun point commun, celle de la gauche, au lendemain de la victoire présidentielle de François Hollande en 2012 ? J’entends par avance mes détracteurs. C’est un mauvais procédé : les deux époques sont trop dissemblables pour que l’on cherche des leçons dans la première qui puissent être utiles pour mieux comprendre la seconde.


Et puis, surtout, j’entends par avance ce reproche majeur : appeler Marc Bloch comme témoin pour faire le procès de François Hollande, c’est une très mauvaise manière. D’autant que le dirigeant socialiste a été élu pour un quinquennat. C’est donc au terme de ce mandat qu’il faudra juger de son action. Prenons donc garde aux procès bâclés et laissons au nouveau président de la République le temps d’engager les réformes annoncées. Selon le vieux précepte mitterrandien, donnons du temps au temps…


J’entends d’autant mieux ces objections que François Hollande, lui-même, a plaidé, en quelque sorte, les circonstances atténuantes. Arguant à bon droit de la crise économique historique qui secoue l’Europe et notamment la France, il a fait valoir qu’il lui faudrait au moins deux bonnes années pour redresser le pays et remettre en particulier ses finances en ordre. Deux bonnes années, en 2013 et 2014, pendant lesquelles des sacrifices seront demandés à chacun. Mais après, a-t-il promis, le gouvernement de gauche entrera dans une nouvelle phase de son action, et les Français recueilleront les fruits des efforts consentis.


Bref, c’est donc sur la durée de son quinquennat que François Hollande a lui-même demandé qu’on dresse le bilan de son action. Et au premier examen, la demande apparaît légitime. Avec plus de 5 millions de demandeurs d’emploi toutes catégories confondues, avec bientôt 10 millions de pauvres, avec en endettement public qui n’a jamais été aussi calamiteux, avec aussi une crise démocratique aggravée par cinq années de sarkozisme, c’est un pays dévasté dont François Hollande assume aujourd’hui la présidence.


Du temps, il faut donc assurément lui en donner. Sans lui faire un procès hâtif. Sans s’empresser de crier à la trahison à la première hésitation –dans ses différentes composantes, la gauche radicale y excelle malheureusement trop souvent. Du temps, oui, il faut lui en donner. Car le pays traverse de nouveau une page sombre de son histoire, rongé qu’il est par une crise économique historique, une crise sociale majeure, et tout autant une crise démocratique et morale gravissime, avec en arrière fond une montée du populisme, de la xénophobie et de l’extrême droite.


Et pourtant, est-ce du temps dont François Hollande a le plus besoin ? Dans les atermoiements des débuts de son quinquennat, est-ce cela qui est en cause ? En vérité, du temps, le pays serait naturellement disposé à lui en consentir. Pour peu que les choses avancent au moins dans le bon sens, fut-ce lentement. Pour peu qu’une dynamique soit enclenchée, même si cette dynamique est parfois entravée par des tergiversations, sinon même des reculs – quel gouvernement n’a pas commis de maladresses ou malmené quelques promesses ? L’important, c’est au moins que le nouveau gouvernement cherche à faire bouger les lignes. À contenir les dérives de cette finance dérégulée qui a mis la planète à feu et à sang depuis 2007. À remettre un peu de justice sociale, dans un pays où la précarité et la flexibilité ont fait des ravages depuis près de trois décennies. À commencer à refonder une démocratie qui a été malmenée par cinq années de sarkozisme – au moins cette réforme-là ne coûte-t-elle pas un sou ; elle est juste affaire de volonté !


Du temps, François Hollande est donc assurément en droit d’en demander au pays. Pas forcément pour « changer la vie » - comme le « peuple de gauche » l’a si fortement espéré en 1981. Au moins pour commencer à changer une société qui est devenue si gravement inégalitaire. Juste commencer. Juste essayer…


Or, tout est là! C’est une histoire stupéfiante et sans précédent pour la gauche qui commence avec la victoire de François Hollande à l’élection présidentielle. Non pas que les socialistes français n’aient pas connu des revers et de graves échecs dans leur longue histoire. Mais, dans le passé, avant d’échouer sinon même avant de se renier, au moins ont-ils tenté, dans un premier temps, d’honorer leurs engagements. Au moins ont-ils cherché à faire voter des réformes sociales ; à retoucher, ne serait-ce qu’à la marge, les règles de fonctionnement du capitalisme. Oui, au moins ont-ils à chaque fois essayé. Au moins ont-ils commencé à faire ce qu’ils avaient promis.


Ce fut le cas sous le Front populaire, qui fit de formidables réformes sociales, parmi lesquelles les congés payés, avant de se heurter au « mur de l’argent » - celui-là même auquel, dix ans plus tôt, le Cartel des Gauches s’était heurté, ce qui avait provoqué sa chute, en juillet 1926. Ce fut le cas encore en 1981, quand la gauche victorieuse chercha à « changer la vie », avant de venir se fracasser sur l’autre « mur », celui de la contrainte extérieure, et de se convertir à une rigueur sans fin. Ce fut le cas enfin en 1997, quand Lionel Jospin chercha à sortir les socialistes de l’ornière libérale dans laquelle elle avait versé avec Pierre Bérégovoy (1925-1993), avant finalement de céder à son tour, face aux avancées du nouveau capitalisme anglo-saxon.


Mais, à la différence de ces illustres prédécesseurs, François Hollande, lui, ne cherche pas un seul instant, une fois élu, à résister. C’est ce qu’il y a d’inédit et de stupéfiant dans son histoire : à l’instant même où il entre à l’Élysée, il conduit une politique qui par bien des aspects prolonge celle défendue et mise en œuvre auparavant, à quelques petits symboles près, par Nicolas Sarkozy. C’est, sur le champ, la mise en œuvre du sinistre principe que Tancredi professe à l’oreille de son oncle, le Prince de Salina, dans le Guépard de Lampedusa (1896-1957): « Il faut que tout change pour que rien ne change ».


Et, à bien y réfléchir, c’est en cela que la lecture de Marc Bloch est malgré tout riche d’enseignements. Car dans ce va-et-vient historique entre deux périodes aussi dissemblables, sans doute faut-il prendre d’infinies précautions. Sage prudence : comparaison n’est pas raison ! Mais envers et contre tout, il y a dans la lecture de Marc Bloch comme un fil conducteur qui offre aujourd’hui encore de précieux repères.

D’abord, d’une époque à l’autre, le ressort principal de l’histoire semble identique. Car c’est effectivement une Étrange Défaitevers laquelle semble vouloir courir François Hollande depuis le premier jour de son accession à l’Élysée. Ou, à tout le moins, les débuts de son quinquennat ressemble à cela. À un étrange renoncement. Avec au bout de la route, une défaite malheureusement prévisible pour les socialistes, et un nouveau regain de tous les populismes. Et peut-être même, l’inquiétante victoire un jour d’une droite qui après avoir fait sienne les idées du Front national serait disposée à s’allier avec lui pour gouverner le pays.


C’est cela aussi la terrible résonance de l’Étrange Défaite, qui tient la chronique de cette année 1940, mais qui fonctionne aussi comme un miroir. On se prend à redouter qu’à l’image d’un Front populaire vaincu et résigné, votant les pleins pouvoirs à Pétain, la gauche d’aujourd’hui puisse, même à son corps défendant, par lâcheté ou par faiblesse, conduire une politique tellement contraire aux intérêts de son électorat que cela finisse par préparer les conditions d’une victoire du camp d’en face -un camp qui n’a plus de frontière étanche avec l’extrême droite.


Avec force, Marc Bloch reproche aux gouvernants de son époque d’avoir déposé « avant l’heure les armes ». Alors, observant cette course à l’échec dans laquelle semblent être pris aujourd’hui les dignitaires socialistes, la terrible formule de Marc Bloch revient immanquablement à l’esprit. Et elle fonctionne comme un rappel ou une solennelle mise en garde : on se prend à penser que les hiérarques socialistes seraient bien avisés d’y prendre garde, eux qui ont déposé les armes le jour même de l’accession de François Hollande à l’Élysée, car sinon elle augurera, forcément, la plus cinglante et la plus désespérante des défaites :  « Ils tombèrent sans gloire. Le pis est que leurs adversaires y furent pour peu de choses ».


Cette sidérante volte-face à laquelle on assiste dès que François Hollande accède à l’Élysée, il faut donc s’appliquer à la décrypter et à la mettre en perspective – c’est la première ambition de cet essai. Prolongation de la politique budgétaire d’austérité ; abandon de la réforme fiscale promise par les socialistes ; mise en œuvre d’une réforme pour stimuler la compétitivité des entreprises quasi-identique à celle défendue par la droite et les milieux d’affaires ; reprise par le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, de thématiques sécuritaires ou xénophobes défendues sous le quinquennat précédent : au lendemain du 6 mai 2012, le « peuple de gauche » peut, jour après jour, éprouver le sentiment qu’on lui vole sa victoire et que tout, ou presque, continue comme avant, l’hystérie sarkoziste en moins.


Mais il faut aussi comprendre les raisons de ce naufrage annoncé de la gauche – et c’est la seconde ambition de ce livre. Car, indéniablement, la gauche est à un tournant de son histoire. Sous les Trente Glorieuses, elle pouvait encore avoir l’ambition de conduire une politique réformiste. Mais, au lendemain de l’effondrement du Mur de Berlin, sous les avancées d’un capitalisme anglo-saxon beaucoup plus intransigeant, construit sur la tyrannie du capital sur le travail, la gauche est devenue au fil des ans de plus en plus impuissante. Au point de ne plus avoir d’énergie du tout. Ni âme, ni volonté…


Déjà, sous Lionel Jospin, on avait pu percevoir des premiers signes d’impuissance ou de renoncement. Face à ces avancées du capitalisme anglo-saxon, face à la tyrannie qu’il exerce sur les politiques publiques, l’ancien premier ministre socialiste avait, à plusieurs reprises, laissé percer sa lassitude, au travers de formules tristement célèbres. De « l’État ne peut pas tout » jusqu’à « mon projet n’est pas socialiste », on avait pu sentir que les socialistes étaient pathétiquement en porte-à-faux dans un monde sur lequel il n’avait plus prise. On avait pu sentir, en bref, une sorte d’essoufflement.


Et c’est précisément ce que révèlent de nouveau les débuts du quinquennat de François Hollande – mais en beaucoup plus grave encore. C’est à un point de bascule d’une histoire longue que nous sommes arrivés : la gauche n’est plus, voilà tout. Peut-être pourra-t-elle plus tard être reconstruite sur d’autre  bases. Mais pour l’heure, la gauche n’a plus ni doctrine, ni ressort. La gauche de gouvernement, s’entend. On ne peut pas même lui faire le grief de trahir ses électeurs en même temps que ses valeurs –, – elle n’en a plus. La gauche n’est plus voilà tout, plus même capable de mesurer qu’elle creuse dangereusement les souffrances sociales du pays et nourrit le vote protestataire.


Il m’a semblé urgent d’en faire le constat méticuleux – tout de suite, pas à la fin du quinquennat car ce qui se joue est trop grave - et d’essayer d’en cerner les raisons profondes. Parce que l’histoire n’est en vérité jamais écrite. Du moins, espérons-le…


De son livre L’Etrange défaite, Marc Bloch dit qu’il est le « procès-verbal de l’an 40». Alors, avec beaucoup de modestie mais beaucoup de minutie, essayons aussi d’établir le « procès-verbal » de cette année 2012-2013. Le « procès-verbal » d’une étrange capitulation…

 

http://blogs.mediapart.fr/blog/laurent-mauduit/040413/letrange-capitulation

 

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6 avril 2013 6 06 /04 /avril /2013 15:54

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Pour en savoir plus sur la Résistance syndicale et politique dans Paris. Le cas de l'Opéra de Paris, ouvrier, musiciens et compositeurs chefs d'orchestre chanteur et cantatrice.

 

A ne pas rater.


 

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6 avril 2013 6 06 /04 /avril /2013 10:25

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Sans doute, mon amour, on n'a pas eu de chance
Il y avait la guerre
Et nous avions vingt ans
L'hiver de 70 fut hiver de souffrance
Et pire est la misère
En ce nouveau printemps...
Les lilas vont fleurir les hauteurs de Belleville
Les versants de la Butte
Et le Bois de Meudon...
Nous irons les cueillir en des temps plus faciles...

La Commune est en lutte
Et demain, nous vaincrons...

Nous avons entendu la voix des camarades :
« Les Versaillais infâmes
Approchent de Paris... »
Tu m'as dit : « Avec toi, je vais aux barricades
La place d'une femme
Est près de son mari... »
Quand le premier de nous est tombé sur les pierres
En dernière culbute
Une balle en plein front
Sur lui, tu t'es penchée pour fermer ses paupières...

La Commune est en lutte
Et demain, nous vaincrons...

Ouvriers, paysans, unissons nos colères
Malheur à qui nous vole
En nous avilissant...
Nous voulons le respect et de justes salaires
Et le seuil des écoles
Ouvert à nos enfants...
Nos parents ne savaient ni lire ni écrire
On les traitait de brutes
Ils acceptaient l'affront...
L'Égalité, la vraie, est à qui la désire...

La Commune est en lutte
Et demain, nous vaincrons...

Les valets des tyrans étaient en plus grand nombre
Il a fallu nous rendre
On va nous fusiller
Mais notre cri d'espoir qui va jaillir de l'ombre
Le monde va l'entendre
Et ne plus l'oublier...
Soldats, obéissez aux ordres de vos maîtres
Que l'on nous exécute
En nous visant au cœur
De notre sang versé, la Liberté va naître...

La Commune est en lutte

Et nous sommes vainqueurs..

Tiré du film " Le juge et l'assassin" de Bertrand Tavernier 1976
Jean-Roger Caussimon Philippe Sarde


 

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5 avril 2013 5 05 /04 /avril /2013 00:20

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Société -   le 4 Avril 2013


Drouot héberge une intolérable vente aux enchères : la tenue de prisonnier d’un camp de concentration

 

Mardi 9 avril, à l’Hôtel Drouot (9e arrondissement de Paris), une vente a priori dédiée aux affiches politiques et historiques. Au cœur du catalogue, pourtant, l’ignoble est tapi : la tenue de prisonnier d’un camp de concentration allemand.

 

Au catalogue des commissaires-priseurs de Delorme & Collin du Bocage, tout serait-il donc permis ? N’en déplaise à la mémoire et aux sentiments des martyrs de la barbarie nazie, la maison de vente parisienne n’a pas hésité à franchir une nouvelle étape dans la marchandisation de la mémoire.


Proposer ainsi aux enchères – cachée au milieu d’affiches – une tenue de prisonnier d’un camp de concentration est un acte de banalisation intolérable pour la mémoire. En tant qu’élus de Paris, nous demandons à la direction de Drouot le retrait de cette mise en vente.

 

Page 194 : http://catalogue.drouot.com/indexDr...

drouot.jpg

 

La tenue rayée de déporté de camp de concentration nazi, lot 900 d'une vente aux enchères à l'Hôtel Drouot, a été retirée du catalogue. "Le lot, proposé à la vente par le fils du prisonnier lui-même, a été retiré du catalogue suite aux réactions suscitées", a déclaré une porte-parole de Delorme et Collin du Bocage sans autre précision.


Ian Brossat, président du groupe PCF/PG au Conseil de Paris.

 


 

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3 avril 2013 3 03 /04 /avril /2013 08:21

Ce petit poème comme introduction à l'appel pour le déplacement au plateau des Glières 

 

La résistance

 

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La résistance

Jamais ne prend de vacances

Sur le terrain son pied ferme danse

 

La résistance

Sait conjuguer son verbe au présent

Intemporelle, elle est de tous les temps

 

La résistance

Erige des barbelés de mots très très haut

Tant pis pour ceux qui ne saisissent ses propos

 

La résistance

Elle est toi, elle est moi, elle est nous

Chaque jour elle nous met à ses genoux

 

La résistance

Jamais ne se trouve en latence

A pied d’œuvre elle œuvre en cadence

 

La résistance

Porte de beaux visages humains

Des voix de velours au bel accent de demain

 

La résistance

Se réunit chaque année pour enfin se fêter

Au plateau des Glières c’est bon de résister 

 

Alors, n’y résistons plus…..Résistance nous voilà !!

 

Carole Radureau (31/03/2013)

 

                                              *************

 

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Article complet sur le déplacement au départ de Nice , lien ci dessous :

 

 

Rassemblement Au Plateau Des Glières . 18 /19 Mai 2013

 


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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 22:57

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Poème contemporain au groupe Octobre (1930 -1937). André Citroën perdit des millions au casino et licencia tous les ouvriers des quais de Javel (là où se situait sa plus grosse entreprise).
C'est Jacques Prévert lui-même qui dit son texte.

 

 

 

http://www.histoiresordinaires.fr/Quand-Prevert-parle-de-Citroen_a313.html

http://linter.over-blog.com/

 


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31 mars 2013 7 31 /03 /mars /2013 18:54

30 mars 2013

 

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De 1914 à 1944 : France : Berceau du fachisme.
Histoire de l’une des plus monstrueuses trahisons de la droite française vis à vis du pays.
Ou comment, dès les années 30, les milieux d’affaires français optent pour le fascisme et choisissent la défaite face aux Nazis.

 

Une heure avec nos historiens André et Cédric.

A écouter : « Le choix de la défaite » d’Annie Lacroix-Riz.

 

posté dans >>> Audio Emissions Radio 


 http://www.polemixetlavoixoff.com/histoire-des-droites-francaises-56-plutot-hitler-que-le-front-populaire/

 



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30 mars 2013 6 30 /03 /mars /2013 20:58

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18 mars 2013 1 18 /03 /mars /2013 10:53

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Le 18 mars 1871, le peuple parisien se soulève, en opposition à la tentative d'Adolphe Thiers - fondé de pouvoir des classes dominantes - de s'emparer des armes de la Garde nationale. Dans la foulée, des barricades sont érigées au faubourg Saint-Antoine et à Ménilmontant, signant le début de la révolution sociale et politique connue sous le nom de Commune de Paris. A l'occasion de ce 18 mars, Contretemps vous propose de lire un texte de l'écrivain Pierre Vinclair, intitulé "Barricades", ayant précisément pour cadre cette formidable insurrection populaire qui constitua, selon le mot de Marx, "le glorieux fourrier d'une société nouvelle". 

 

                                                   – Extrait de Commune mémoire

 

J'avais compris : je n'en sortirais pas, de Paris.

On pourrissait sur les barricades. Les troufions buvaient toute la journée, jouaient aux cartes en ragotant sur le capitaine et déployaient des bouillies d’opinions immédiatement dissoutes par le soleil qui nous brûlait la face. Ils commentaient la valse des généraux qui prenaient, les uns après les autres, la direction de la Garde Nationale pendant que Versailles les écrasait, jour après jour, sur le front de l’ouest ; et alors que nous n'avions que la rumeur de ces combats, chacun croyait savoir mieux que les autres comment la guerre devait être menée. Les échos d’affaires politiques, les décrets du Conseil, le nombre de prisonniers, de morts et de mouchards exécutés, les messages de Thiers : oui tout ce qui déchaînait leur enthousiasme me glissait dessus.

— C’est évidemment Rossel, qu’il nous faut !

— C’est Dombrowski !

— C’est Delescluze !

— Delescluze est trop vieux ! Pourquoi pas Pyat pendant que tu y es !

— Tous ces vieux briscards qui ne veulent que prendre leur revanche sur quarante-huit ! C’est notre révolution ! Nous en sommes les soldats ! Elle ne doit pas leur servir à régler leurs comptes !

— La Commune, elle est à nous !

— Vive la Commune !

— La Commune éternelle !

Quant aux civils, pour eux la Révolution était faite, et la Commune avait gagné depuis longtemps. Dès mi-avril, ils s'étaient mis à flâner, à s’aimer. Ils s’arrêtaient pour discuter : on n’est plus des bêtes, disaient-ils à qui voulait l'entendre. Leurs élus leur parlaient, de fait, comme à des hommes véritables et leur laissaient le droit de vivre et de penser, d’avoir du temps, d’aller où bon leur semblait, et même de se distraire. Le soir, ils se retrouvaient dans les cafés, assistaient aux concerts et dansaient, chantaient, buvaient jusqu’à l’ivresse. Comme ils étaient heureux !

 

Comme ils étaient insouciants. Thiers et sa meute de seigneurs, derrière deux cents rangées de fantassins, vinrent bientôt leur dire :

— Votre demande n'est pas celle de mortels.

Les toits flambèrent. On continua de trouer la ville – ponts écroulés, façades arrachées. Les barricades se transformèrent en fosses communes. Les devantures dégueulèrent les entrailles des immeubles. Les derniers Parisiens qui le pouvaient déménagèrent et leurs habitations furent des torches de paille sous un feu que rien ne calma, vorace, rampant le long des rues, transformant la Paris en brasier. La terre des corps en décomposition, le ciel en cendres. Les Versaillais, gagnant le terrain dégagé, répandirent la rumeur : les insurgés eux-mêmes auraient mis le feu à la ville – et ceux-ci furent lâchés par la population civile. Leurs troupes reculèrent jusqu’à la Butte aux Cailles. Pendant ce temps-là les immeubles se contaminaient, communiquaient le feu comme une parole que l’on échange et le dragon les avalait, d’un coup de langue bleue, les uns après les autres. Le 24 mai, il rampait sur les arêtes de l’hôtel de ville. Il le caressa, en explora les contours, paradant sous le ciel nuageux – et puis… Il s’engouffra, dévorant le bois des portes, les poutres, les meubles et les parquets, ne laissant derrière lui qu’un tas de corps pourris, de macchabées la bouche cariée par la cendre. Les pans de murs tombaient et le peuple assistait, impuissant. Le coeur de Paris s’effondrait. Les habitants hurlaient, demandaient à Jésus de pardonner leur faute et la grande bouche de Dieu depuis le ciel cramoisi grondait :

— Quand je vous appelais, vous ne m'avez pas écouté : vous pouvez m'appeler, je ne vous écoute plus.

La Commune était faite.

Brûlée vive, la Commune éternelle ! Delescluze avait dit :

— Maintenant foin des bataillons rangés… Place au peuple, aux combattants aux bras nus !

L’armée n’existait plus – ne restaient que des lambeaux d’escouades composées de socialistes et de fous – et ceux qui n’étaient pas morts avaient fui. Lécréand, lui, n’était pas socialiste. Peut-être était-il fou.

Mais les troupes versaillaises finiraient par passer chez Anne-Marie – elles ratissaient chaque pièce à la recherche de fédérés, inspectaient tout. Si l’on l’y avait trouvé, on les aurait fusillés, tous les deux. Seule elle s'en sortirait.

Il aurait dû mourir depuis longtemps déjà, depuis l'enfer du 4 avril. Il se rendait à ce brasier. Son corps serait comme le pétrole répandu dans la ville : un combustible pour le feu, une croquette pour le dragon qui dévorait Paris. Sa peau, sa chair et ses muscles brûleraient, et il s'évanouirait dans cette fumée qui rejoignait les cieux.

— Adieu.

Anne-Marie restait sur le seuil.

Elle le regardait partir dans le soleil éblouissant, le chassepot en bandoulière. Dans le costume de son mari, il rejoignait la porte Saint-Martin, où se livraient les derniers combats. C'était le 27. Paris libre n'était plus qu'un minuscule carré : Parmentier, le faubourg du Temple, les Trois-Bornes et les Trois-Couronnes, le boulevard de Belleville. Entre ces quatre rues s’élevaient des barricades de rien – des pavés, de la ferraille des chaises et les murs effondrés des maisons que les canons les uns après les autres avaient défoncés et dessous, de la terre, du gravat – à quoi tenait leur territoire ? Leur Commune ! Il n’y avait plus que ça – et pourquoi ? Les Insurgés, sans doute, avaient désiré sans fin. La liberté avec l’égalité, le loisir et l’argent, et la fête – tout ! L’amour ! Et à mesure qu'ils désiraient, leur pauvre Commune se réduisait, comme la peau de chagrin. Les derniers braves se retrouvaient au milieu de cinquante hectares entourés par les flammes, en un combat désespéré de mille contre cent mille.

 

Je n’étais pas encore monté au front lorsque, parmi trois cents autres combattants (non plus des soldats ou des civils mais rien que des hommes avec la rage, coincés derrière leur barricade comme des rats), je le reconnus, lui, avec sa grande mèche de cheveux bruns et son air élégant, à une vingtaine de mètres de moi, nonchalamment posé contre le mur de la manufacture d'instrument de musiques, dans un renfoncement de la rue Timbaud : c'était Arnaud Blanchard, le soldat du fort d'Ivry. Il fumait là son clope, le regard vide, ce Blanchard même à cause de qui j'avais passé quinze jours derrière les barreaux. Je le fixai de mes yeux noirs – je lui aurais planté ma baïonnette dans le ventre – et il tourna la tête vers moi.

— Hep, toi.

Un mélange de colère et de joie m'envahit. M'avait-il reconnu ? Je m’approchai doucement.

— Oui, camarade ?

Il tapait du pied, sur le sol.

— Je crois bien que je vais mourir aujourd’hui ! dit-il calme, avec une douce mélancolie.

La mort, déjà, avait pris possession de lui ; elle avait recouvert ses yeux d'un léger voile gris qui chaque seconde tournait encore un peu au blanc. Derrière ce minuscule linceul, on eût dit qu'il voyait, non pas les barricades, non pas les combattants aux corps tressés de muscles fins, prêts à se rompre, yeux globuleux barbes hirsutes, qui se relayaient sur le front, mais quelque chose qui n'était pas vraiment du monde, pas ici-et-maintenant. Ou plutôt, même s'il les voyait, car il pouvait les voir, bien sûr, que ce n'était pas lui qui les voyait, mais bien la mort, s'étant installée sous son crâne, qui voyait par ces yeux et comptait froidement, sans même se régaler de cette comptabilité macabre, ses prochains locataires.

— Je vais te montrer quelque chose, dit-il.

 Il me prit par la manche : la mort nous avait fait colocataires. Je me laissai guider, comme si c'était la destinée elle-même qui me tirait le bras, pour m'emmener à l’intérieur de la manufacture.

— Ne t’inquiète pas, il n’y a personne.

Il a refermé le grillage. Nous nous sommes retrouvés dans une cour intérieure pavée, bordée de maisons basses, au milieu de laquelle un arbre était planté. Mon esprit fatigué était prêt à tout recevoir ; quelque serpent eût habité dans ce pommier que je l'aurais compris. Nous étions proche du jugement dernier ; les structures mythiques d'un réel essoré de sa graisse se révélaient dans leur pureté. Tout faisait sens.

— Tu entends ?

Blanchard souriait. Un obus éclata. La rumeur des combats reprit…

— Quoi ?

— Approche-toi…

Il me fit lever la tête :

— Il y a des oiseaux, regarde, imbécile ! C'est le printemps, et la vie continue…

Dans le pommier en fleurs, deux moineaux sautillaient, de branche en branche.

Blanchard me fit signe de le suivre. Le bâtiment principal de la manufacture s’élevait sur cinq étages de briques et il fallait monter une douzaine de marches pour parvenir au rez-de-chaussée. Comme l’énorme porte de fonte avait été forcée, il lui suffit de se servir de son fusil comme d’un levier pour l’ouvrir dans un grincement ; j'ai pénétré juste après lui dans une pièce immense, sombre et humide, où résonnaient chacun de nos pas – elle était vide et avait dû être pillée. A l’intérieur, seule l’ouverture grillagée d’un soupirail diffusait la lumière.

Blanchard s’enfonça dans les ténèbres de la pièce.

— Qu'est-ce que tu veux ?

Dans cette pénombre, ma voix, en sortant de ma bouche, s'était dix fois amplifiée. Elle emplissait chaque recoin de l'immense salle vide, comme si ce n'était pas moi, véritablement qui parlait, mais quelque puissance démoniaque venue de moi bien sûr, immatérielle, vivant au fond de moi et qui se fût servie de mes lèvres pour donner une chair à son discours – et me ventriloquait pour résonner encore.

— Tu vas voir.

Et la voix de Blanchard résonnait tout pareillement, et quand elle frappait mes tympans montait et descendait de partout en même temps, m'assaillant à droite et à gauche tant la manufacture, pareille à une église, l'avait amplifiée, déformée, diffractée. Nos frères mouraient, pendant ce temps-là, sur les barricades.

— On a mieux à faire, dis-je en amorçant un demi-tour.

Sa voix comme une camisole vint m’embrasser :

— Lécréand !

Il se souvenait de mon nom, il m'avait reconnu. Alors c'était tout différent. Je me suis retourné.

— Qu'est-ce que tu veux Blanchard ?

Je ne bougeai pas.

— Là où je suis, il y a une trappe, dit-il. Dessous, il y a une cave qui peut accueillir cinquante personnes… Je vais te montrer. Ils ne te trouveront pas.

— On a soudain peur de la mort ? Je croyais que tu t'y préparais, bien bravement...

— Toi tu peux choisir, tu peux t’en sortir. Écoute-moi. Nous allons nous faire écraser, c’est certain.

— Je veux me battre.

— Ne sois pas ridicule. On a déjà perdu.

Je le savais. On avait en effet déjà perdu, et désirer se battre, maintenant, n'avait plus aucun sens. Blanchard se rapprochant traversa la lumière que filtrait le soupirail. L’ombre des grilles se déplaça sur son visage :

— Y a rien à gagner. Ne sois pas stupide. Ta femme t’attend.

—  Laisse tomber je te dis.

— Je te comprends, Lécréand. Mais tu te trompes, si tu crois qu'il y a d'un côté des héros, et de l'autre des lâches. Y a que des vivants et des morts.

Je me suis rapproché de lui. Il aurait fallu me faire partir il y a deux mois, au lieu de me jeter dans la geôle. J'allais lui foutre mon poing dans la figure et il la fermerait, une bonne fois pour toutes. Comme ça on serait quitte.

— Tu ne semblais pas si sûr de ton engagement, quand je t'ai rencontré…

Comme une corde trop tendue qui craque, je me ruai vers lui et le plaquai à terre. Je pris sa gorge dans mes pouces – et je serrai, serrai jusqu’à ce qu’il ne puisse plus parler.

— Écoute-moi bien maintenant ! J'ai crié comme un fou. Je m’en souviens plus, de ma femme, t’entends !

Ce n’était pas ma voix, amplifiée par la carcasse vide du bâtiment, qui partait et revenait s'enrouler autour de moi, étrangère la voix d'un autre, située derrière ma voix, venue du soupirail – la voix d’un démon chuchotant derrière mon corps et me domptant, me possédant. Blanchard se défendait à peine sous la pression des pouces au bout desquels je sentais le tambour du pouls s’emballer – mais allais-je tuer cet homme ? Allais-je tuer cet homme ? Effrayé par moi-même je lâchai son cou et saisis sa tête pour la rejeter avec violence, et le punir de m’avoir rendu fou.

Arnaud comme un sac s’effondra sur le sol.

— J’ai vu le visage de mes amis réduits en bouillie ! Les corps coupés par les obus ! L’odeur des morts est rentrée si loin dans mon crâne qu’elle a pourri mon corps, alors je suis déjà mort t’entends !

Il se tenait le cou, gesticulant dans sa douleur.

— Diable ! Lécréand ! articula-t-il d'une voix étouffée.

J'ai couru vers la porte de fonte comme pour me fuir, poursuivi par le bruit des pas. Le soleil m’arracha les yeux. On va finir par se bouffer entre nous ! Pensai-je.

Je me suis assis – ou plutôt j'ai balancé mon corps sur un sac de gravats qui traînait là. Mes jambes tremblaient. Reste tranquille maintenant ! Il n’y en avait plus que pour quelques heures.

 

Petit à petit, mes yeux se sont habitués au soleil.

 

Et de cinquante, on est passé à vingt hectares ; l’étau n’en finit pas de se resserrer – on ne mourrait pas l’arme à la main, on crèverait étouffés. Les soldats continuaient de se battre – on entendait les coups de feu et parfois le grondement d’un canon – d’où venaient-ils et quelles tourments avaient-ils traversés, eux qui comme moi se retrouvaient ici au fin fond de l’enfer ? Les mêmes que moi peut-être... Et j’imaginais les batailles, les famines et la boue sur les visages, les pieds déchiquetés, le ventre troué, les épaules meurtries par les sacs…

Blanchard m’apostropha depuis le grillage de la manufacture :

— Lécréand…

Son visage était blême et ses yeux plissaient sous la lumière. Mes pieds continuaient de taper nerveusement le sol. Je n'ai pas répondu. Il se tenait le cou d'une main.

— Longue vie à toi ! cria-t-il.

Il reprit son souffle :

— La mienne, salaud, je l’offre à la révolution.

Et comme si elle lui avait obéi, la détonation lourde et rauque d’un boulet qui sautait par-dessus la barricade, d’effroi me fit tomber de mon sac de gravats – j’étais déjà au sol – les chiens ! – et la terre volait en éclats, retombant sur mon crâne comme une pluie de cendres – le bruit qui trouait les tympans – les yeux cachés au creux des paumes, aveugle et respirant avec difficulté, je n’osais plus me retourner – la fin commençait donc – nous serions morts bientôt, et j’entendis le râle long, la partition où s’élevait le chant des morts – c’était le sifflet de mon tympan percé – replié sur moi-même j’écartai les doigts pour voir à travers leur grillage. Croisant les insurgés, fuyant dans l’autre sens et le visage roussi par la poussière, Blanchard courait l’arme à la main vers la barricade qu’enfonçait déjà l'offensive des troupes de Versailles – il trébuchait sur un pavé, embrochait un soldat, levait son arme comme s’il criait victoire. Un bourdonnement continu s’était installé dans le palais de mon oreille. Versailles ! Ils profitaient de l’effet de surprise pour pénétrer dans le dernier quartier et il remuait son arme éraflant les visages, perçant les corps, manquant de tomber vingt fois et retrouvant l’équilibre comme un pantin dégingandé –

D’une pression insignifiante sur la gâchette un soldat fit planer une seule balle de simple métal.

Blanchard tomba.

Sur la Terre qui tournait imperceptiblement, comme à son habitude.

 

Tu as de la chance, dit une voix, d’avoir survécu jusque ici ! Il n'y a pas de héros. Déguerpis !

Les soldats n’étaient plus qu’à cinquante mètres et où aller ? Je fonçai vers la première porte ouverte, me prit les pieds dans le palier et en m’aidant des mains m’engouffrai comme un chien, à quatre pattes, à l’intérieur d'une maison, la traversai et ressortis par la fenêtre opposée – la baïonnette se prit dans un rideau – je regroupai mes forces et d’un grand geste le déchirai – l’ouïe revint – une nouvelle rue – j’entendis les voix qui me poursuivaient – des balles trouèrent les murs – je courus comme un dératé tête en avant – zigzaguant sans logique – Paris déserte n’était qu’une ruine grise immense et moi la bête traquée qui n’avais plus de souffle… Je m’arrêtai d’un coup, éclatai une fenêtre avec la crosse de l'arme, escaladai, et m'écrasai au milieu d’une pièce qui puait la mort. Quelques maigres affaires étaient rangées. On n’habitait sans doute plus ici depuis des semaines.

 

Je rampais sur le plancher défoncé au milieu du verre – quand d’autres voix s'engouffrèrent, avec le vent, par la vitre brisée – je m'accroupis derrière le mur – c'était les soldats de Versailles qui poussaient leurs nouveaux prisonniers – j’avais du verre dans les paumes des mains, sur les genoux. Ils tournaient au coin de la maison et s'arrêtèrent juste derrière la fenêtre éclatée, à un mètre de moi. J’entendais leur haleine, devinais leur coeur battre.

— Es-tu de ceux-là, toi ? demandait-on.

— Nous en sommes, répondit un enfant.

— Quel est ton nom.

— Victor, m’sieur !

— On va te fusiller, attends ton tour.

Le sang dégoulinait, réchauffant mes genoux.

— Vous permettez que j’aille rapporter cette montre à ma mère ?

Les prisonniers durent s'aligner contre le mur, et je sentais déjà les balles plier leurs corps et traverser le mur pour m'embrocher dans la foulée.

Brochette de fédérés.

Alors, malgré le verre et malgré la douleur, sans précaution je m'allongeai par terre et je sentis les bords de chaque bris de la fenêtre, les uns après les autres, crever ma chair en mille endroits comme des boutons de pus.

— Tu veux t’enfuir ?

Je retenais mes larmes et l’enfant répondit :

— C’est juste là, au coin de la rue, et je vais revenir, monsieur le capitaine.

— Va-t’en, drôle !

J'ai prié.

 

Les balles ont tardé à venir.

 

J'ai entendu la voix fluette de l'enfant :

— Je suis prêt !

Alors une rafale de balles a balayé le mur – retiens ton souffle – seules deux d’entre elles l'ont traversé – les autres bien logées au fond des coeurs, des estomacs, dans les mètres d’intestin percés – et l’envie de vomir m'a pris lorsque j'ai entendu juste de l'autre côté de la fenêtre le glouglou du sang qui bullait hors de la bouche des fusillés.

— On les laisse là ?

 

— Qu’est-ce qu’on en fait, lieutenant ?

— On verra plus tard.

J’ai à peine eu le temps de relâcher mon souffle qu’un obus a pété cinquante mètres plus loin ; les soldats se sont mis à courir. J'ai rampé vers la porte située à l’opposé de la fenêtre, me suis levé et ai ouvert la porte – et le soleil, en m'inondant de sa lumière, se réfracta dans les petits bris de verre qui restaient accrochés à mon costume, au milieu du sang qui coulait. Dans la douleur mon corps, mu par une force obscure, s'est remis à marcher, malgré les entailles qui s'ouvraient à chaque pas lorsque les jambes pliaient et dépliaient, et le vent léger qui s’engouffrait à l’intérieur – les portes des maisons se succédaient comme des taches de couleur et les rues perpendiculaires se bousculaient et se croisaient. Je ne sais pas d'où viens cette force. Si c'est ce que l'on appelle l'âme. Ou si c'est l'animal en soi. Ou peut-être était-ce la ville elle-même et les rues, affolées, qui pivotaient autour de moi – non pas moi qui marchais – mais la ville tout entière qui venait s'enrouler autour des jambes – combien de centaines de mètres parcourus, seul, sans rencontrer personne ?

 

La rue me jette, racontait Lécréand à Allemane, sur l’énorme trouée de Ménilmontant au moment où cinq soldats tirent un prisonnier les mains accrochées dans le dos, gesticulant tellement qu’ils le piquent d’un coup de baïonnette pour le faire avancer. Ils rient – cinq soldats pour ce seul pauvre homme ! Je suis à moins de dix mètres d’eux – je dois relever la tête pour les saluer – il faut que je la relève, je vais relever la tête – je contracte les muscles du cou et mes cheveux tirent mon visage, un rayon de soleil dans les yeux mais – Diable ! Mon regard attrapé par la moustache de… Malcombe me dévisage et – Henri ! – les cinq soldats me dépassent… enfin et je vais respirer… ma tête retombe sur ma nuque… je me suis dominé – Malcombe ! – mais je n’ai pas fait quatre pas que j’entends :

— Vive la Révolution ! Vive la Commune !

Sa voix éclate, brise le ciel comme un vitrail et je vais tomber sur les genoux – je me retourne et les soldats lui tapent sur le haut du crâne d’un coup de crosse pour qu’il la ferme et Malcombe continue :

— Vive la Commune !

Lui aussi s’est retourné car c’est à moi qu’il parle mais les soldats ne l’ont pas compris et ils le rouent de coups et Malcombe en tenant son regard fixé dans le mien s’effondre : un soldat lui a planté sa baïonnette dans le ventre – il tombe à terre et je cours, je cours pour le prendre dans mes bras et on l’achève d’une balle – il se tord sur le sol – du sang va sortir de sa bouche – je suis à genoux aux pieds des cinq soldats.

Ils découvrent ma présence en riant, ils ont compris la scène. Ils rient et mes larmes coulent sur la nuque de Malcombe :

— Henri ! Henri ! Pourquoi n’as-tu pas pris la fuite ?

Le ciel déverse dans mon crâne une tristesse infinie. On agrippe mes aisselles, me relève. Un enfant sans visage empaqueté dans son casque me demande si je connais cet homme – et l’on m’embarque en me poussant d’un coup de baïonnette. Malcombe est resté mort, gisant à terre sur le boulevard comme un chien crevé de Ménilmontant. 

Et les combats ont continué sans nous, finissait Lécréand.

 

— En haut de la rue Oberkampf, répondait Allemane, on se relayait sur le front, caché derrière la barricade, ou tireur isolé, dans les immeubles. On a attendu là, des heures durant, en se contentant de tirer une balle de temps en temps pour affirmer notre présence – jusqu’à ce qu'ils viennent, jusqu'à ce que les combats s’engagent, et que les hommes, des deux côtés, montent risquer leur vie – ça voulait dire la perdre. Bien sûr on savait que les coups de fusils ne suffiraient pas. Mais on n'avait pas le choix : où l'on se battait, où l'on se laissait écraser. Alors, de chaque côté, couverts par les tireurs cachés derrière les murs, les soldats ramassaient toutes leurs forces pour se mettre à courir, escaladant comme ils pouvaient l’accumulation de briques, de tuiles et de tas de sables qu'étaient les barricades, et tombant, se remettant debout, grimpant tout de même à l’affrontement – jusqu’à embrocher leurs ennemis d’un coup de baïonnette. Ils se ruaient sur tout ce qui bougeait, jusqu'à ce qu'un Versaillais leur décoche un pruneau et ils s’affaissaient là, au milieu du néant, avec les autres en train d’agoniser – n’ayant plus pour passer les heures qu’il leur restait à vivre qu’à écouter la symphonie des cris, des larmes et coups de feu qui éclatait partout. On profitait d’une trêve pour les en dégager et on les emmenait dans des hôpitaux de fortune – les chambres des maisons de la rue – à l’intérieur desquels les femmes et les vieux essayaient de les rafistoler. D’autres pièces servaient de cantine ; on s’asseyait, lorsqu’on était en pause, le long de petites tables qu’on avait mises bout à bout et qui faisaient banquet. On mangeait trois fois rien – un peu de pain, de la soupe et des rats, quelques pigeons rôtis – consciencieusement, en sachant que c’était là notre dernier repas ; alors, on s’efforçait d’oublier les obus qui tombaient et dans le drame lorsque tout brûle autour, lorsque l’on ne se bat plus pour vaincre mais parce qu’il n’y a que ça – ou bien s’abandonner à la mort – de la place se faisait à nouveau pour de la joie. Parce qu'on n'en n'avait plus que pour quelques instants et que le futur n’existait plus. Les conventions, les codes, tout s’écroulait autour de nous ; le masque derrière lequel se cachent les hommes craquelait, se fissurait – et j'ai compris soudain l’ivresse de nos quarante-huitards, eux qui couraient depuis vingt ans après leur révolution, la hargne des Polonais comme Dombrowski et Wroblewski qui combattaient pour la Commune à peine revenus des émeutes de Pologne où ils avaient manqué dix fois, cent fois d’y passer – et le sursaut des Algériens ! Ils le connaissaient sans doute tous, ce moment où les hommes affirment... quoi ? On n'a qu'à appeler ça leur liberté ; et ils ne parlent plus, alors, aux autres hommes – c’est face à la mort qu’ils se dressent. Elle éclabousse leurs derniers instants d’une lumière éblouissante. C’est le vertige avant le saut. Vous vous dressez face au néant – vous lui offrez sa part de viande. Ainsi derrière ces barricades retrouvait-on tous les miséreux de la terre et tous les exploités, tous ceux à qui l’on avait dit que leur vie ne valait rien : et ils revêtaient, en luttant, leurs habits glorieux, prouvant non seulement que leur vie en valait bien une autre, valait bien celle des ennemis – mais même plus : qu’elle se cabrait, se rebellait, et résistait – et qu’il faudrait en dépenser, de l’énergie, de la mitraille et de l’intelligence, pour la réduire à rien. Ainsi le 28 mai derrière la barricade tous les damnés du monde luttaient contre cette République qui refermait sur eux son piège. N’était-ce pourtant pas des hommes, de l’autre côté des barricades ? Et des Français, nos frères ? Ils agitaient les torches, les flambeaux et les lançaient dans les immeubles. Leurs yeux pleins de pétrole jouissaient à voir le feu – et ils dansaient, parce qu'eux aussi voulaient leur part de sang. Les énormes canons derrière lesquels ils avançaient ne nous envoyaient des boulets que faute de mieux : ils auraient préféré nous avaler, ou nous broyer. J’étais avec les Justes. Je me battais à leurs côtés. Et ce sentiment seul suffisait à justifier la mort : c'était notre salut. Maintenant que les ans ont passé tout cela me semble moins sûr. Ne sommes-nous pas toujours, en même temps que des opprimés, les exploiteurs de ceux qui souffrent plus que nous ? Exploiteurs, traîtres, salauds – lorsqu’en 78, à Nouméa où l'on nous avait déportés, les Kanak se sont révoltés – qu’est-ce que nous avons fait ? C’était un peuple, comme les Algériens, ils ne demandaient rien qu’à être libres, comme nous l’avions fait en défendant Le Havre contre la Prusse et Paris contre Versailles – un peuple simplement, qui réclame le droit d’être libre... Pourtant on les traitait comme des esclaves, comme des chiens ! L’autonomie – et quoi ? Répondions-nous. Les animaux sont autonomes ? Alors qu'est-ce qu'on a fait ? Nous qui étions là-bas parce qu’on nous y avait déportés, nous nous sommes rangés dans les bataillons de nos maîtres ! Nous avons obéi à ceux qui nous avaient privés des nôtres – oui nous avons lutté avec les porcs, avec ceux qui, la veille encore, frappaient sur notre propre peau le cuir du martinet, qui nous battaient et qui nous humiliaient : les militaires et les matons. Oui ! C’est avec le pouvoir de Versailles que nous avons écrasé les Kanak ! Alors... Le bon camp ! Les Kanak, on leur avait pris leur île, et on élevait notre bétail sur leurs terres, en leur défendant de cultiver... Alors qu'au fond ils étaient... ben socialistes, socialistes comme les Communards avaient toujours rêvé de l'être... Au bout d'un moment ils ont été à bout et ils se révoltèrent – on jeta dix de leurs chefs en prison. Alors les Kanak se vengèrent en massacrant tous les colons qu’ils rencontraient – y compris les demeures des forçats algériens. Et du coup les Kabyles eux aussi se sont mis dans les rangs pour se venger – et ils se sont offerts à la disposition de l’armée. Du moins ceux qui restaient...

 

— Parce que les Kabyles eux aussi, reprit Jean Allemane, se sont fait déporter... même si, pour la plupart, ils ne sont pas arrivés jusqu'à destination – le scorbut les a emportés... En vérité, on les a tués petit à petit, parce que sur Le Rhin on n’avait chaque jour qu’un biscuit et un seizième de pain, un bouillon, des haricots et un quart de vin à onze heures ; un biscuit, une soupe de riz, un second seizième de pain à seize – et c’est tout ! Alors on attendait le dimanche, parce que le dimanche une soupe avec du lard nous remplissait le ventre – mais eux, les Kabyles, ne mangeaient pas de porc – et on les affama comme ça. Le scorbut, la gangrène. Ils tombaient dans les pommes les uns après les autres.

 

— Ils étaient en révolte, les Algériens aussi... Du Tarf à Bou Hadjar, et jusqu'à Bône... Au moment même qu'on se battait, nous autres ! Leur insurrection s'amplifia, jusqu'à ce qu'un dignitaire de l'administration, Mokrani, finisse par les rejoindre ; c'est grâce à lui que les révoltés parvinrent à soulever plus de deux cents tribus, un tiers de l’Algérie ! Un jour que Mokrani, portant un burnous gris pour ne pas être distingué par la blancheur de ses vêtements, ayant gravi je ne sais plus quelle colline, avait mis pied à terre pour faire ses dévotions, sa prière terminée, il resta immobile à quelques pas des siens, inspectant le terrain. Soudain une balle le frappa entre les deux yeux ; il murmura le début d'une profession de foi : « La Illa Illa Allah ; Mohamed Rassoul Allah » et il tomba prosterné, le front touchant le sol. Les siens, m'a dit Kaouane, crurent d’abord qu’il faisait une nouvelle prière ; mais on ne le voyait pas se relever – et il est resté dans cette attitude de prière éternelle, éternelle – il était mort. Alors, partout autour, les hommes se mirent à chanter des chansons, en l'honneur de leur chef :

 

j’ai regardé par la fenêtre

c’est le bachagha qu’on lavait

on lui enleva les burnous

on lui mit un linceul blanc

on l’enterra à Béni-Abbès

soyez contents ô caïds

soyez contents ô chrétiens

 

— Bref, reprenait Allemane, les Kabyles eux aussi qui avaient tant souffert se liguèrent avec les gardes pour exterminer les Kanak. Ainsi la colonie emploie-t-elle ses esclaves pour mater ses esclaves ! On a exécuté vingt types à Dumbéa, et les cent trente Kanak vivant à Nouméa, on les a internés au bagne. Ensuite, le premier septembre, assistés par les Algériens et même par une tribu Kanak, on a attaqué Ataï, le chef du clan rebelle, et vous savez quoi ? C’est un Kanak qui l'a tué ! Les esclaves contre les esclaves… La Nation… Elle ne se mouille pas, la Nation ! Les puissants montent les Miséreux les uns contre les autres… Ils nous ont fait couper la tête d’Ataï, et ils l’ont envoyée à Paris en guise de trophée. Et cette fois encore, nous nous croyions du bon côté. Mais je sais maintenant qu'il n’y a pas de mort juste. Pas même les morts de Versailles. Maintenant – car quand je regardais par-dessus la barricade les pauvres types qu’ils envoyaient sur le front, j’avais beau me douter que c’était des pauvres gens comme moi, avec une femme et des enfants, je jouissais à l’idée d’une balle qui sortirait de mon chassepot et percerait leur carotide – oui, je voulais leur sang, c'est tout. On n’apprend rien avec des balles, oh non, sur les barricades – on n’apprend rien ! Les Algériens, et les Kanak – et les Polonais – qui s’étaient révoltés contre le colon Russe ! Tous écrasés également, et les uns par les autres !

 

— Pourtant, finit Allemane, je ne regrette pas de m'être battu, d'avoir été sur cette barricade de la rue Oberkampf, parce que si l'on n'a pas tout le temps été du bon côté, on n'était quand même entre braves, à ce moment-là – entre petites gens qui nous battions contre une armée qui pouvait nous broyer et qui nous a broyés. Nous pouvions nous enfuir et nous n'avons pas fui, nous nous sommes battus jusqu'au bout... Mais il faudrait s'arrêter là, Lécréand, je vais m'arrêter là, quand nous étions au sommet de Paris dans notre minuscule carré, dans notre ville libre, et réduite à la taille d'un timbre – on devrait toujours s'arrêter un peu avant, comme s'il n'y avait rien eu après, comme si l'histoire s'était finie, ici, et comme si nous avions gagné. Oui, camarade, dans mon récit on a gagné, et on sera restés du bon côté, éternellement : sur cette barricade où se sont retrouvés, à un moment donné, les révoltés, les exploités ayant enfin sorti leurs armes. C'était très beau. Le reste n'aura pas eu lieu. Pas cette fois.

 

17/03/2013 

Pierre Vinclair

 

http://www.contretemps.eu/r%C3%A9cits/barricades



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