A l'occasion la mort de Louis Aragon,
le 24 décembre 1982
"canempechepasnicolas" publie un texte de notre ami Georges Aillaud,
un grand connaisseur et collectionneur d'Aragon
relatif à la publication clandestine, "Les étoiles"...
LE JOURNAL CLANDESTIN LES ETOILES(1943-1944)
Aragon écrivit et publia durant toute la seconde guerre mondiale, d’abord sous son nom, puis sous pseudonyme et enfin sans aucune signature. Tel fut le cas du journal Les Etoiles dont 17 numéros parurent de février 1943 à mars 1944, alors qu’il était réfugié, avec Elsa Triolet, à Saint Donat sur l’Herbasse, dans la Drôme.
Le nom de ce journal n’est autre que celui de la structure qu’Aragon avait choisie pour organiser les intellectuels en résistance dans la zone sud, par groupes de cinq personnes, si possible de métiers et d’opinions variées, ceci sous forme d’étoiles à cinq branches dont chacune pouvait correspondre avec une autre étoile, et ainsi de proche en proche.
Si Aragon parla parfois de cette organisation, il ne mentionna pratiquement jamais le journal lui-même. Il l’évitait car de nombreux noms de participants ont été cités dans diverses publications d’après-guerre (nous en connaissons une trentaine) alors qu’il est évident que certains d’entre eux n’ont jamais participé à l’écriture de ce journal et que certains autres ont, tout au plus, communiqué des informations à partir desquelles Aragon rédigeait.
Le journal tenta de survivre après-guerre en Région Parisienne, sous une autre direction, mais la place était largement occupée parLes Lettres françaises. Il cessa rapidement.
On ne connaissait aucune collection complète des Etoiles, pas même à la BNF, jusqu’à ce que la collection personnelle de Georges Sadoul, alors agent de liaison d’Aragon, soit découverte.
Elle a été publiée, conjointement avec Les Lettres françaisesclandestines au Cherche Midi en 2008 (1), ce qui est un évènement de taille puisque « édition originale », en livre, de textes d’Aragon 64 et 65 ans après leur parution clandestine en journal !
On appréciera la spécificité de cette feuille, cherchant à rassembler très largement, n’hésitant pas à publier un article élogieux sur Bergson après sa mort, ou citant toujours les prêtres conjointement avec les instituteurs lors d’appels aux regroupements de résistance.
Un texte d’Aragon, dès novembre 1943, tout en nuances, alerte sur ce que devra être l’épuration. Il répond, très longtemps à l’avance, à toutes les accusations dont l’auteur sera accablé ultérieurement.
Ce journal mérite d’être lu.
Georges Aillaud
(1) "Les Lettres françaises et Les Etoiles",
1942-1944
dans la clandestinité"
présentées par François Eychard et Georges Aillaud
Editions le cherche midi